Le 28 novembre 2018, Madame Sans Gêne critique Macron quant à la réduction du nucléaire alors qu'elle n'avait rien fait pour la fermeture de Fessenheim qui devait être effective avant la fin du quinquennat Hollande et fixé des objectifs bien vagues pour la suite.

Ségolène Royal : « Le lobby nucléaire a obtenu gain de cause »

Après les annonces de Macron mardi en matière de politique énergétique, l’ancienne ministre de l’environnement s’inquiète d’un « ralentissement » face aux enjeux climatiques.

Emmanuel Macron a annoncé, mardi 27 novembre, ses orientations en matière de politique énergétique. Il a notamment acté le report de l’objectif de baisse du nucléaire, le reculant de 2025 à 2035, promis la fermeture de 14 réacteurs nucléaires avant 2035 et s’est engagé sur une trajectoire ambitieuse de développement des énergies renouvelables.

 

Pour Ségolène Royal, la présentation de la feuille de route énergétique de la France pour les dix prochaines années est décevante. L’ancienne ministre de l’environnement avait fait voter en 2015 la loi de transition énergétique qui a instauré l’obligation de mettre en place une Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) tous les 5 ans.

 

Comment percevez-vous les annonces d’Emmanuel Macron et François de Rugy ?

Cet été, tout le monde s’est inquiété de la situation climatique, et le dernier rapport du Giec a encore alerté sur l’urgence de l’action. La situation est grave, il y a une opportunité pour accélérer, et pourtant on assiste là à une forme de ralentissement.

Beaucoup d’actions annoncées mardi étaient en réalité déjà présentes dans la PPE précédente, en particulier la fermeture des centrales à charbon. Je cherche encore ce qu’il y a de nouveau pour permettre la transition écologique.

La principale différence, c’est le retard dans la baisse du nucléaire. La conséquence, c’est qu’il va falloir changer la loi, rouvrir les débats, et donc les polémiques, ce qui va déstabiliser le secteur énergétique. Or la loi de 2015 prévoyait une forme de souplesse, puisqu’elle fixait un « horizon 2025 » pour réduire la part du nucléaire, ce qui laissait une marge de manœuvre de quelques années. Aujourd’hui, l’échéance est repoussée de dix ans. Les raisons de ce report sont purement idéologiques. Il montre que le gouvernement n’a pas confiance dans le développement des énergies renouvelables et l’amélioration de l’efficacité énergétique. C’est un signal très négatif.

Le président a pourtant promis des fermetures de réacteurs nucléaires à partir de 2027…

Cela veut dire que pendant le quinquennat d’Emmanuel Macron, il ne se passera rien du tout, ni même dans le quinquennat suivant s’il était réélu. Cela veut aussi dire que le lobby nucléaire a obtenu gain de cause. En réalité, on repousse le problème à plus tard. Qui peut dire où nous serons en 2035 ?

La seule chose qui sera faite durant ce quinquennat, c’est la fermeture de la centrale de Fessenheim, et cela nous l’avions déjà signé lors du mandat précédent.

Tout cela est finalement assez proche de ce qu’espérait EDF. Les fermetures potentielles de réacteurs sont repoussées à des échéances extrêmement lointaines.

Que pensez-vous de la trajectoire sur les énergies renouvelables ?

Ces annonces sont positives, mais pour arriver aux objectifs, il faut mettre les moyens en face. Quels seront les outils à disposition ? Pourquoi les objectifs sont-ils si lointains ? Les entreprises du secteur sont inquiètes.

Là aussi, le gouvernement se contente de reprendre les objectifs qui étaient dans la loi de transition énergétique. C’est une bonne chose, mais il n’y a rien de plus !

Quelles peuvent être les conséquences possibles de ces choix ?

La logique de la loi de transition énergétique, c’est que le développement des énergies renouvelables et de la performance énergétique entraînait par ricochet la baisse du nucléaire. Si on prend dix ans de plus, on retarde tout.

Pourquoi remettre en cause cet objectif ? Pour des raisons encore une fois idéologiques de défense de la filière nucléaire. Or si on entretient l’illusion que tout peut continuer comme avant et que le nucléaire reste une énergie performante, on n’aide pas la filière à bouger.

Tout ce qui ralentit la transition énergétique se paye ensuite très chèrement. On le voit avec l’absence d’ambition sur la rénovation des logements. La suppression du crédit d’impôt sur le remplacement des fenêtres a un impact important sur l’emploi et sur les travaux réalisés.

J‘espère que lors du débat parlementaire sur la révision de la loi de 2015, les députés vont rétablir les outils de la transition énergétique et de la croissance verte.