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Au secours Ségolène revient !
23 août 2020

Mélenchon et Erdogan à l’unisson contre le «

 

Mélenchon et Erdogan à l’unisson contre le « néo-colonialisme » de Macron au Liban

 

Le président turc et le leader « insoumis » attaquent dans les mêmes termes la campagne française de solidarité avec le Liban.

« Le Liban n’est pas un protectorat français », affirme Jean-Luc Mélenchon le matin du 6 août, alors que le président Macron vient seulement d’arriver à Beyrouth, deux jours après la catastrophique explosion du port (au moins 177 morts et 300.000 sans-abri).  « Ce que Macron et compagnie veulent, c’est restaurer l’ordre colonial » au Liban, déclare le président Erdogan, une semaine plus tard, dans un discours à Ankara. Le chef de la France insoumise dénonce le « sentiment de toute-puissance » qu’aurait exprimé Macron au Liban, là où Erdogan fulmine: « Nous, ce n’est pas courir après les photos ou faire le spectacle devant les caméras qui nous intéresse ». Le vice-président turc, en déplacement à Beyrouth, le 8 août, accuse Macron de « mener une politique étrangère sur la base d’une perspective coloniale ». Mélenchon « met en garde contre une ingérence dans la vie politique du Liban » et contre « les réformes de Macron ».

TOUTES LES INTERVENTIONS OCCIDENTALES SONT MAUVAISES

Cette convergence entre Erdogan et Mélenchon sur un des dossiers les plus sensibles du moment a de quoi surprendre. Le leader « insoumis » ne ménage en effet pas ses critiques à l’encontre du président turc, considérant, lors de sa visite de janvier 2018 à Paris, qu’il « n’était pas le bienvenu ». Lors de l’offensive turque d’octobre 2019 contre les milices kurdes de Syrie, Mélenchon avait appelé les militaires français présents sur place, entre autres, à « répliquer et à mener inlassablement la guerre pour vaincre Erdogan le terroriste ». Emporté par son élan, il avait même exhorté Macron à « aider » Bachar al-Assad à « défendre son pays contre l’invasion de l’armée d’Erdogan ». Le président turc, à supposer qu’il suive l’actualité intérieure en France, peut difficilement se sentir proche d’un tel pourfendeur de sa politique.

Et pourtant, les deux hommes se retrouvent pour condamner par principe la campagne de solidarité lancée par Macron avec un Liban en état de choc. C’est que, pour l’un et l’autre, toute intervention occidentale est foncièrement mauvaise. Mélenchon considère que le seul et unique impérialisme ne peut émaner que des Etats-Unis et de leurs alliés européens. Ce prisme idéologique le rend beaucoup plus indulgent envers les interventions de la Russie et il va en 2016 jusqu’à « féliciter » Poutine pour sa campagne militaire en Syrie. Erdogan, que son homologue russe a laissé occuper une partie du territoire syrien, suit à l’évidence une ligne comparable. D’autant plus que la Turquie recrute en Syrie les milliers de mercenaires qui servent de supplétifs à sa campagne de soutien au gouvernement de Tripoli. Mais c’est Macron qu’Erdogan cible pour son appui au camp libyen opposé, celui du « maréchal » Haftar, alors même que la Russie est bien plus engagée que la France dans ce camp-là.

LA GEOPOLITIQUE PLUTOT QUE LES PEUPLES

Tous deux convaincus du caractère fatalement nocif d’une intervention occidentale, Mélenchon et Erdogan se retrouvent aussi dans une vision du Moyen-Orient comme grand théâtre de bras de fer géopolitiques, dont les peuples sont de fait exclus. Il s’agit pour Ankara de pousser ses ambitions « néo-ottomanes » en Syrie, en Irak, en Libye et, désormais, en Méditerranée orientale, en invoquant de manière réthorique les populations concernées, mais sans jamais leur donner voix au chapitre. Aux yeux de Mélenchon, le conflit syrien n’est « ni une guerre civile, ni une guerre de religion, mais une guerre de puissance ». Ce constat catégorique évacue la réalité même du peuple syrien, de sa lutte contre la dictature Assad et de ses aspirations révolutionnaires. Dans une telle logique, ni Erdogan ni Mélenchon ne peuvent accepter l’accueil populaire réservé à Macron à Beyrouth et la colère exprimée alors contre l’incurie et la corruption de la classe politique.

La dénonciation du supposé « néo-colonialisme » de l’Elysée ne tient pas face aux faits, alors que la France est le huitième fournisseur du Liban (derrière la Turquie) et son quatorzième client. Peu importe néanmoins aux agitateurs de l’épouvantail d’un « protectorat » français sur un pays occupé par Israël durant 22 ans (jusqu’en 2000), par la Syrie durant 29 ans (jusqu’en 2005), où le plus puissant des partis, le Hezbollah, a prêté allégeance à l’Iran et à sa République islamique. Le président Macron s’est engagé, le 6 août, à revenir à Beyrouth le 1er septembre pour évaluer la mise en oeuvre de l’aide internationale, mais aussi d’un « nouveau pacte politique ». Le défi est de taille, face à des leaders communautaires arc-boutés sur le statu quo, au premier rang desquels Michel Aoun, le président de la République (le gouvernement libanais a démissionné sous la pression populaire dès le 10 août).

Ce défi s’aggrave de la volonté de Trump d’en découdre avec l’Iran, surtout après le camouflet du rejet d’une résolution américaine de sanctions de la République islamique au  Conseil de sécurité de l’ONU (seule la République dominicaine a joint son vote à celui des Etats-Unis, les 13 autres membres votant contre ou s’abstenant). La France s’efforce avec constance de neutraliser les visées conflictuelles de Washington et de Téhéran à Beyrouth, afin que le peuple libanais ne soit justement pas pris en otage par un tel bras de fer géopolitique. Cette double équation libanaise et internationale se complique enfin de la signification elle-même controversée du 1er septembre 1920. La seconde visite du président Macron au Liban coïncidera en effet avec le centenaire de la proclamation du Grand-Liban sous mandat de la France. 

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